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Jusqu'où ça peut mener l'amour ?

 

Jusqu’où ça peut mener l’amour ?

« Il est tout de même agréable d’être deux »

Paul Adam

 

 

Alvin1 est dans le salon confortablement installé dans son fauteuil. Débora, sa femme, entre et s’approche de la discothèque, elle en sort quelques disques ; elle hésite entre le disque d’or du Golden Gate Quartet et le 5e volume de la Djangologie ; elle retourne ce dernier disque et vérifie que c’est bien sur celui là que se trouve son morceau préféré : « Baby, won’t ou please come home ». Elle le met alors sur la platine et, sur les premières notes, tire son fauteuil devant la cheminée qui crépite ; elle ouvre son livre à la page qu’elle avait précédemment marquée.

Alvin vient de tourner la dernière page du livre qu’il est en train de lire, une compilation de « 15 histoires macabres » réunies par France Loisirs en 1998. Il se tourne vers sa compagne qui est, maintenant plongée dans le tome III des Histoires d’amour de l’histoire de France de Guy Breton.

« - Jusqu’où ça peut mener l’amour ! dit-il en refermant son livre.

Mais, chéri, c’est moi qui lis des histoires d’amour, je croyais que tu lisais des histoires macabres ?

Oui, mais là, il s’agit d’une nouvelle de Yann Mens : « Spécial Request »

Et alors ?

Ben, un des personnages semble ne pas supporter que sa femme l’ait quitté pour en épouser un autre.

Il l ‘aime toujours ?

C’est la question que je me pose...

Pourquoi ? Qu’est-ce qu’il a fait ?

L’auteur décrit un tueur en série qui, au bout du compte, chercher à cacher le meurtre d’une certaine Laura qu’il envisage de tuer à la fin du récit. Le comble c’est que l’auteur décrit un grand amateur de jazz, comme quoi, la musique n’adoucie pas les mœurs…

Et je suppose que son ex s’appelle Laura ?

Tu as vu juste ! En plus, ce grand amateur de jazz tue des femmes qui portent toute des prénoms contenus dans des titres de musique de jazz, comme « Laura…

C’est quand même bizarre, je viens de terminer le chapitre VIII de mon livre dont le titre est « Henri IV renonce à faire assassiner sa femme »2. Il n’était pas encore roi comme le laisse entendre le titre, mais il voulait épouser sa maîtresse 3qui l’avait aidé à financer son armée, pour en faire une reine, alors que le trône se rapprochait de lui4 ; c’était en quelque sorte un juste retour des choses. Ses conseillers les plus proches, d’Aubigné et Turenne, lui conseillèrent de n’en rien faire. Mais la leçon de cette histoire est que c’est l’amour d’une femme qui a poussé Henri de Navarre au crime et c’est l’intérêt qui l’en a empêche,5 alors que dans ton histoire le crime serait effectué pour faire disparaître un amour perdu. Je crois bien que j’aurais préféré vivre au XVIe siècle !

… Chérie ?

Quoi ?

Si on se mariait… »

 

En cette fin de XXe siècle, Débora, oubliant le XVIe a accepté d’épouser Alvin. Ils se sont mariés sur une musique de jazz et ils eurent beaucoup d’enfants.

 

 

1 Prénom d’origine germanique qui signifie « le très prudent ».

2 Sa femme était alors sa cousine Marguerite de Navarre, dite la reine Margot.

3 Il s’agit de Madame de Gramont, vicomtesse de Duras, belle-sœur de Corisande (autre maîtresse d’Henri) et grande amie de Margot, la femme du roi de Navarre. Marguerite (c’était aussi le prénom de la vicomtesse) était alors veuve.

4 Henri de Guise venait d’être assassiné.

5 C’est Agrippa d’Aubigné qui convainc Henri de Navarre que ce n’était pas son intérêt.